Les Rencontres Musicales de Clermont de l’Oise, pour leur quatrième édition (2018), ont tenu à commémorer Albéric Magnard, qui a passé dans l’Oise ses dix dernières années, et y est mort dans les conditions que l’on connaît.
Le premier rendez-vous qui concernait Magnard, le 15 septembre, a été une très intéressante conférence de Jean-Marcel Kipfer. Il a su captiver un auditoire venu nombreux (la salle était pleine à craquer), mélangeant intelligemment extraits et explications de la musique de Magnard, et réflexions sur l’homme qu’il était et la vie qu’il a menée. C’est pourtant un exercice difficile, car la tentation est grande de mettre en avant ce qu’il y a eu de spectaculaire dans cette vie tellement riche. Mais le conférencier a su éviter cet écueil, tout en faisant un récit enthousiaste, vivant, et aussi haut en couleurs qu’ont été la vie et la musique de cet homme hors du commun.
Puis, le 5 octobre, il y a eu un concert avec un programme remarquable de qualité, de cohérence, de diversité et d’ambition (sonates pour violoncelle et piano de Debussy, Magnard, Fauré et Poulenc). Yan Levionnois et Guillaume Bellom l’ont défendu avec un extraordinaire talent : engagement de tous les instants, prises de risque abouties mais sans rien de démonstratif, construction maîtrisée, technique infaillible… Nous avons tous été très impressionnés. Le programme était fort dense, exigeant et puissant. Ces deux très jeunes musiciens ont montré une maturité et une profondeur remarquables. En ce qui concerne Albéric Magnard, nos deux artistes ont magnifiquement interprété, avec une intensité bouleversante, cette Sonate pour violoncelle et piano altière et poignante.
Le lendemain, c’était un récital de Claire Désert. Son cher Schumann y était en très bonne place, avec une Fantaisie de toute beauté, intense, profonde, d’un engagement émotionnel qui a emporté tout le public. L’ensemble du programme était à l’avenant : Chopin, Beethoven, des transcriptions par Liszt de Schumann et de Verdi, et bien sûr, notre Albéric Magnard ! Claire Désert avait choisi, pour leur contraste, deux extraits de ses Promenades (Envoi et Saint-Cloud), qui ont étonnamment apporté une certaine légèreté à ce programme qui ne l’était guère. Voilà Magnard d’un point de vue pour le moins inhabituel ! Mais pour notre plus grand plaisir.
Malheureusement l’excellent Quatuor Cambini n’a pas pu, pour des raisons de santé de l’un de ses membres, monter le dernier mouvement du Quatuor de Magnard qui était prévu. Nous aurions été très curieux de l’entendre, joué sur instruments d’époque. Nous espérons que ce n’est que partie remise.
À l’occasion de ces Rencontres Musicales, un petit livre sur Magnard a été réalisé : La dernière partition d’Albéric. Son originalité est d’être écrit à la deuxième personne du singulier, l’interlocuteur n’étant autre qu’Albéric Magnard lui-même. Il s’adresse aux jeunes « de 9 à 15 ans ». En une trentaine de pages de texte (très vivant, de Carole Derozier), avec de nombreuses illustrations (certaines d’archives, d’autres originales d’Erlina Doho), et une préface de l’arrière-petite-fille de Magnard (Milena Vlach-Magnard), voilà une excellente première approche de cette personnalité si complexe.
Merci à l’Association la Musicale de Clermont de l’Oise, à sa présidente Cécile Grange, à sa conseillère musicale Claire de Varine, et à tous ses bénévoles. Nous avons été merveilleusement accueillis à Clermont, et surtout ils ont fait un remarquable travail, avec enthousiasme, passion, générosité et bonne humeur, pour mieux faire connaître Magnard dans sa région d’adoption. Nous restons bien entendu en contact, et avons déjà des idées pour de futures et fructueuses collaborations !